Ukraine: on the road to decentralization

par | Mai 23, 2016 | Projet, Ukraine | 0 commentaires

Le meilleur moyen de tenter de comprendre, de tester les premiers effets, de ressentir l’accueil du processus de décentralisation en cours en Ukraine: filer dans les régions, rencontrer le responsable de district qui va obtenir son camion de pompier, le président d’une organisation qui attend depuis 25 ans un bout de route sans nids de poule, le vétéran de la guerre du Donbass à qui l’état veut apprendre le métier de coiffeur, le patron de la région qui parvient enfin à chauffer correctement l’école ou celui qui veut rénover le palais de la culture. Et finir à Kiev, au ministère du développement régional … à esquisser des graphiques peu probants.

 

Article Details

Location Kiev

Date 23.05.2016

le palais de la culture de Laski a mal vécu la fin de l'URSS.

© Olga Ivashchenko

Le village de Laski fait partie de la région administrative de Naroditchy (170km NO de Kiev) . Son palais de la culture a mal vécu la fin de l’URSS, la décentralisation pourrait le sauver. Anatoly Leonchuk espère le rénover avec le nouveau budget qu’il pourrait obtenir via le processus en cours. Anatoly Leonchuk est à la fois chef de la nouvelle entité administrative créée autour de Narodytchi , mais il est encore chef de l’ancien district appelé à disparaître … quand les lois adéquates auront été votées. Il résume, « c’est compliqué ». © Olga Ivashchenko

HISTOIRES DE SOLDATS

Tu es un jeune homme, un homme, un vrai. Tu fais l’armée, tu es mobilisé dans le Donbass pour lutter contre les « séparatistes », tu acceptes un 2ème tour de service parce que tu es un patriote, un vrai. Tu es blessé, rien de grave, tu es démobilisé. Bonne nouvelle, l’état via un programme décentralisé dans les régions te propose une aide à la réinsertion professionnelle. Ton administration régionale à Jitomir te propose une formation de coiffeur.

Je ne vous décris pas la tête du soldat quand il articule le mot « coiffeur ».  © Olga Ivashchenko

 

Un bout de chemin, une nuit de train, avec un ancien jeune soldat professionnel ukrainien démobilisé. Une explosion lui a volé son ouïe. Il ne touche aucune pension, sa quasi surdité a été officiellement décrétée une maladie et non liée aux combats. « Pendant ce temps, le 1er ministre fêtait son 1er milliard avec les députés. Officiellement il gagne quelques milliers. Tu peux m’expliquer cela ? »

Je n’ai pas pu.

Au moins, se console-t-il, il a droit aux transports publics gratuits à travers tout le pays.

 

« A Kiev, ils ne savent même pas que ces routes existent »

Petro Kosachevych est un homme heureux. Il réclame depuis plus de 25 ans par courrier officiel son bout de route sans nids de poule pour l’accès au village. Il l’a obtenu cette année. Les 1ers bénéfices d’un soupçon de décentralisation.

Comme un enfant devant son nouveau jouet. Un enthousiasme du fond cœur. Le responsable de la région de Nova Borova Hryhorii Rudiukre vient tout juste d’un voyage d’étude sur la décentralisation en Pologne. Avec peut-être la possibilité d’obtenir un camion de pompier qui le fait rêver.  Avec ses administrés, sans aucune aide de l’état, sans argent, il a réussi à maintenir en état véhicule vieux de 30 ans et à construire une caserne digne de ce nom. Mais le remplacer ne serait pas du luxe.

La décentralisation à l’ukrainienne en quelques mots. Des villages qui avaient des budgets jusque là ridicules se sont rassemblés en une nouvelle entité administrative. Leurs budgets additionnés permettent de dégager suffisamment d’argent pour réaliser des projets dans l’un ou l’autre des villages, selon les priorités. Cette nouvelle entité a aussi accès à des fonds attribués spécifiquement à la décentralisation par le gouvernement. Elle a le choix des projets qu’elle veut réaliser avec cet argent, mais doit les soumettre à la région, puis au ministère concerné pour approbation.

« Plus d’argent dans les régions, c’est un plus grand risque de corruption dans les régions » s’inquiète un activiste de la société civile. Une certaine logique. Son organisation vient de lancer une campagne de prévention. Ou comment décentraliser le pouvoir sans décentraliser la corruption.

Une série de reportages en cours de réalisation avec des journalistes Ukrainiens sur la thématique de la décentralisation, au cœur de la crise que traverse l’Ukraine. Un premier projet pilote de la Fondation Hirondelle dans ce pays.

Gaetan Vannay

Grand reporter, reporter de guerre, spécaliste de la Russie, je poursuis aujourd’hui mes voyages et reportages en journaliste indépendant. Ancien correspondant en Grande-Bretagne et en Russie, ancien chef du bureau international de la RTS-radio, j’ai étudié le Russe à Ekaterinbourg et le comportement en terrain hostile dans les forêts écossaises avec des SAS britanniques. Le Collège de la Royale Abbaye de St-Maurice, les Universités de Neuchâtel et de Genève ont aussi contribué à mon édification.